Le brin d'herbe

Blog philosophique et politique

La perfection du monde
Vendredi 8 avril 2011

Il est assez évident que le monde n'est pas parfait, pour autant que le concept de perfection ait un sens : mille choses pourraient aller mieux. Par exemple, les rosiers pourraient ne pas avoir d'épines.

rose

Mais en même temps, il est assez évident aussi que le monde a une sorte de perfection. La question est : de quel type de perfection s'agit-il ?

En fait, dès qu'on se penche sur une imperfection du monde, sur une chose qu'on aimerait voir résolue, dans sa vie ou en général, d'un coup de baguette magique, on se rend compte que ce serait de la triche, et qu'en un sens, n'a de valeur que ce qui dépend de nous.

Et c'est là toute la beauté, toute la perfection du monde : malgré toutes les merdes dont il est empli, malgré la déprime qui nous guette même sous un soleil éblouissant (il a beau tout dominer, il est si vite caché par les nuages !), ce qui est splendide, c'est cette liberté qui est la nôtre, c'est le fait que nous soyons paumés là comme ça, seuls. Car c'est ce qui donne de la valeur à toute chose. Et du coup même notre déprime, par exemple, devient aimable et nécessaire, elle devient la condition du bonheur, parce qu'elle ne dépend que de nous et il ne dépend que de nous de la surmonter.

Et c'est finalement ça la vie, ce simple défi : créer son bonheur soi-même. Car chacun est créateur de son monde, de ses valeurs, de son univers. Chacun décide de donner (ou non) de la valeur aux choses, de les aimer, et c'est de là que naît tout bonheur.

La vie est cela, ni plus ni moins, et on peut faire bien des choses pour aider autrui, mais au fond, lui seul peut créer son propre bonheur. On ne peut pas aimer à sa place.

Sous cette lumière l'amour devient le sésame du bonheur. L'impératif chrétien d'aimer n'est donc pas seulement moral ; mais s'il faut aimer, il ne faut pas forcément aimer les autres, on peut aimer les choses. Et pour ce qui est de l'amour des hommes, il ne s'agit pas non plus d'aimer tous les autres. On peut se contenter d'aimer quelques amis (cela suffit pour être heureux).

Bref, on peut simplifier ce vieux commandement moral pour en faire un guide éthique fort simple :

Aime !

Mots-clés :  éthique   monde   vie   bonheur   valeurs   perfection   théodicée   amour   
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La valeur de la pensée
Lundi 30 août 2010

L'intelligence est louée par ceux qui en sont dépourvus. Et par Platon.

Mots-clés :  pensée   esprit   valeur   
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La tribu, nouvel idéal régulateur
Mercredi 11 août 2010

En philosophie politique, on trouve de multiples fictions, comme le notait Yves-Charles Zarka dans Figures du pouvoir : l'état de nature pour les philosophes modernes (Hobbes, Spinoza, Locke, Rousseau) ; la fable des abeilles de Mandeville et la main invisible d'Adam Smith pour les économistes ; le voile d'ignorance pour John Rawls ; etc.

Sans complexe, après cette prestigieuse lignée je propose une nouvelle fiction : celle de la tribu, du village.

En effet, de nombreuses questions aujourd'hui sont rendues complexes et illisibles par la taille des société, qui déconnecte les hommes les uns des autres (c'est la fameuse déliquescence du lien social, ou la substitution d'une solidarité organique à la vieille solidarité mécanique, pour le dire dans les mots obscurs de Durkheim).

Prenons par exemple la question des droits d'auteur. Question philosophique complexe quand on raisonne abstraitement, dans la société moderne : comment rémunérer les chercheurs scientifiques, les artistes dont les œuvres sont piratées en ligne, les ingénieurs qui déposent des brevets, les laboratoires pharmaceutiques ?

Eh bien, imaginons une tribu. Cela permet de simplifier les choses et de les ramener à leur essence, à leur concept. Un homme invente un nouveau procédé qui permet de construire les maisons beaucoup plus vite. Pensez-vous qu'on lui versera des droits d'auteurs, autrement dit qu'une partie de la tribu se mettra à travailler gratuitement sous ses ordres ? ;;

Je ne pense pas. Je pense qu'il sera adulé, mais qu'il n'aura pas un kopek.

Léonard de Vinci
Génie regrettant de n'avoir pas un kopek

D'où on peut tirer le principe politique suivant : le génie sera glorifié, mais non rémunéré. Les seuls droits d'auteurs seront symboliques, car les œuvres du génie sont elles-mêmes symboliques, et ne sauraient être appropriées... Il faut rendre à Dieu ce qui est à Dieu, et à César ce qui est à César. C'est aussi un point de vue marxiste : les œuvres du génie seront rémunérées au prix nécessaire pour nourrir le génie !

Mots-clés :  économie   justice   politique   droits d'auteur   valeur   
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Les abeilles
Dimanche 22 mars 2009

Ça y est, cette fois c'est officiel, c'est le printemps. :D

Pour célébrer ce jour, une petite pensée pour les abeilles.

L'abeille est un animal merveilleux : en cherchant à se faire son propre miel, elle féconde les fleurs et assure la reproduction de milliers de plantes. C'est un modèle du libéralisme, de l'idée qu'il n'y a pas de contradiction entre l'égoïsme bien compris et l'intérêt général. D'ailleurs La Fable des abeilles de Mandeville est à l'origine du libéralisme et du concept de « main invisible » d'Adam Smith.

A l'heure actuelle, l'abeille est menacée par les pesticides, et on découvre sa valeur incommensurable pour l'agriculture, la vie humaine et l'équilibre de la planète entière. Comme toujours c'est dans la crise qu'apparaît la vraie nature des choses. Et comme toujours la valeur de la nature, non prise en compte par le calcul économique, se révèle infiniment supérieure à celle des activités humaines.

Mots-clés :  animaux   métaphore   libéralisme   échange   valeur   nature   
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La valeur de la nature
Mercredi 28 janvier 2009

Il y a en gros deux théories économiques de la valeur :

En passant de la théorie classique à la théorie néoclassique on est passé d'une définition objective de la valeur à une définition subjective.

Ces deux théories concernent la valeur d'échange et non la valeur d'usage du bien en question. De sorte que l'oxygène que nous respirons, bien qu'il ait une valeur (d'usage) extrêmement élevée, a une valeur d'échange à peu près nulle.

Plus profondément, selon la logique économique la nature n'a aucune valeur, car elle donne gratuitement.

Cette bizarrerie se répercute dans la mesure du PIB : le PIB ne mesure pas la véritable valeur des choses. Par exemple, une épidémie ou une augmentation des accidents de la route sont des facteurs de croissance, car ils impliquent davantage d'activité économique.

Il pourrait sembler que les problèmes écologiques nous obligeront à prendre en compte la valeur réelle des choses, et même à savoir la mesurer précisément pour en faire supporter les coûts de manière juste à ceux qui détruisent les richesses naturelles. Mais en vérité il suffit peut-être de s'en tenir à la conception classique : ce qui détermine le prix d'une pollution (ou de tout autre externalité « négative »), c'est tout simplement le coût de la dépollution ou du nettoyage correspondant. Autrement dit, la valeur « réelle » des choses ne peut être mesurée que négativement en quelque sorte.

Et c'est bien normal : car la valeur de la nature est infinie. On retrouve ici une idée bien connue : la notion même de valeur n'est définie que dans un système. La nature, étant la condition de toute valeur, n'a pas de valeur. (C'est-à-dire qu'elle a une valeur infinie, si on préfère.) On pourrait d'ailleurs appliquer le même genre de raisonnement aux banques centrales et aux Etats, qui en tant que prêteurs en dernier ressort constituent les conditions du système et ne sont donc pas évaluables dans ce système...

Décidément tout se tient, et les mêmes lois s'appliquent aux banques et aux poissons !

Mots-clés :  économie   nature   valeur   environnement   écologie   pollution   
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La fée est une tricheuse
Lundi 26 janvier 2009
On tous dû se farcir ce genre de conte quand on était gosse : la fée arrive et dit au pauvre type qu'il a droit à trois voeux.

*:)

Hypothèse merveilleuse et fascinante... L'enfant ne peut s'empêcher de jouer avec cette idée et de se demander ce qu'il répondrait à cette fée. Moi aussi, je me suis posé cette question.Car, en y réfléchissant, quelle valeur accorder à la vie et aux bienfaits qui nous tombent dessus, s'ils sont le fruit de la magie d'une fée ?
(C'est un peu comme au jeu : au début, on peut se satisfaire de gagner en trichant, mais bien vite cela ne nous donne qu'une demi satisfaction, car nous sentons bien que ce n'est pas une véritable victoire. Si nous trichons c'est que nous ne sommes pas capables de gagner en respectant les règles.)
Le seul mérite qu'on a là-dedans, c'est d'avoir été élu, choisi par la fée, pour des raisons d'ailleurs obscures. Cette satisfaction-là peut à la rigueur satisfaire un enfant, mais rapidement on découvre qu'une pièce de dix centimes qu'on a soi-même gagnée a une valeur bien plus grande que tout l'or du monde qu'une fée dépose à nos pieds.
Ceci, du moins, est l'idée stoïcienne : n'attache de valeur qu'à ce qui dépend de toi. Aujourd'hui je suis donc stoïcien. Une autre fois je défendrai l'idée exactement contraire.
Mots-clés :  valeur   stoïcisme   tricher   
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