Le brin d'herbe

Blog philosophique et politique

Beauté et publicité
Samedi 23 octobre 2010

Si la définition philosophique de la beauté comme « satisfaction désintéressée » est vraie, alors la publicité efficace ne doit pas être belle, parce que le but de la publicité est précisément de stimuler nos intérêts.

Schopenhauer distingue ainsi le beau, qui apaise la volonté, du joli (ou, pour certains, du kitsch), qui stimule le désir.

Et il faut reconnaître que si les publicités sont souvent amusantes, divertissantes, ou excitantes, elles sont rarement belles à proprement parler.

pub lampadaire

Mots-clés :  publicité   beauté   joli   désir   
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Bienveillante nature
Mardi 17 août 2010

L'automne dernier, alors que je me promenais dans une banlieue perdue, avec d'assez rares maisons entrecoupées de jardins plus ou moins abandonnés, je suis tombé sur un spectacle fascinant : à un endroit, il y avait un vieux grillage abîmé, rouillé, laid, tordu, agressif et acéré. La vigne vierge, rouge sombre en cette saison, l’avait envahi, recouvert, atténué, adouci, enrobant chaque angle de la ferraille, masquant sa laideur.

vigne vierge
Un autre exemple de vigne vierge...

La nature est incroyable. Cette tendance spontanée à la beauté est merveilleuse. Avec quelle bonté, avec quelle noblesse, avec quelle simplicité elle embellit tout, recouvrant la laideur humaine de sa main magique, sans la moindre rancune !


Mots-clés :  nature   beauté   anecdote   
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Ô beauté
Vendredi 30 juillet 2010

La beauté ne se mange pas.

Mots-clés :  beauté   manger   aphorisme   
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Notre maigre idéal
Dimanche 11 juillet 2010

Curieuse tendance que celle à l'amincissement des modèles.

mannequin maigre   Giacometti, femme debout

Certains philosophes y ont vu un désir de l'enfance et de la jeunesse éternelle, spécifique au jeunisme de notre époque peterpanesque.

Je propose une autre hypothèse : le désir est manque, et chaque époque rêve ce qui lui fait défaut. Hier on mourrait de faim, alors les Vénus étaient replètes. Aujourd'hui on est obèse, alors les mannequins s'affinent.

Mots-clés :  idéal   beauté   histoire   femme   
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La beauté du temps
Lundi 31 mai 2010

Le temps est beau. Sa beauté se montre dans les vieux objets, les pierres millénaires, les rides des vieillards, les lierres des murs et les lichens des forêts. C'est ce que les japonais appellent le sabi (beauté de l'ancien).

sculpture de la cathédrale saint-pierre

Mais c'est encore le temps, je crois, qui fait en partie la beauté des ouvrages d'artisanat finement et longuement ciselés et travaillés : les fines sculptures en pierre des cathédrales, par exemple, qui ressemblent à de la dentelle. Ici la beauté réside dans l'importante quantité de travail contenue par la chose, c'est-à-dire dans le temps qu'elle cristallise. On s'en rend compte quand on voit le même objet, parfois dans un matériau également noble, mais réalisé par des procédés industriels, à la chaîne. Certes, l'idée que l'objet n'est pas unique contribue alors à notre dépit. Mais je crois que la rapidité de sa production y est aussi pour quelque chose. On pourrait encore dire que ce plaisir esthétique est celui de la domination : l'objet longuement travaillé est comme imprégné de la sueur d'hommes, et celui qui possède l'objet possède ce travail, il est symboliquement leur maître.

Je trouve ce critère intéressant pour juger de la valeur de l'écriture. La littérature, je crois, nous plaît souvent parce qu'elle est riche et travaillée, exactement comme une sculpture ciselée dans le marbre. A contrario, la prose journalistique est déplaisante car pauvre et toujours écrite à la va-vite (je dois malheureusement inclure ce blog dans cette triste catégorie !).

Il y a ici une tension entre ce principe, en accord avec l'idée de Nietzsche du génie comme grand travailleur, et le fait que l'effort lui-même disparaît de l'œuvre d'art. Il faut donc du temps, mais aussi de la maestria. Sinon, ça devient laborieux. Ça sent l'huile, comme on dit.

Mots-clés :  esthétique   temps   beauté   travail   
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Sanglot chanté
Lundi 24 mai 2010

Il existe un genre de musique indienne (par exemple celle de Pandit Jasraj) qui consiste en chants langoureux, mélancoliques, presque des gémissements : on croirait entendre un sanglot chanté.

Cette musique a une indéniable beauté. Mais tout aussi indéniablement, elle évoque et représente la souffrance. La souffrance serait donc belle ? ?

Mais oui, et on le sait depuis longtemps, surtout nous autres Occidentaux, adeptes du spleen et de la mélancolie.

Reste à savoir que penser de cette esthétique christo-maso...

Mots-clés :  musique   souffrance   beauté   esthétique   
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Les râteaux
Mardi 11 mai 2010

Les petites choses poétiques de la vie sont comme de jolies feuilles mortes...

rateau

...Mais je n'aime pas trop les râteaux ! Il y a des pensées qui une fois écrites sont comme des papillons cloués sur un mur.

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Action et réaction
Samedi 30 mai 2009

Nietzsche avait proposé un critère « vitaliste » pour juger une œuvre d'art :

A propos de toutes les valeurs esthétiques, je me sers désormais de cette distinction fondamentale : je me demande, dans chaque cas particulier, « est-ce ici la faim ou la surabondance qui est devenue créatrice ? »
Nietzsche, Le Gai savoir, § 370

En fait, ces catégories se ramènent tout simplement aux catégories de Spinoza : action et réaction.

On pourrait définir l'art, avec Rodin, comme tout ce qui est intense, tout ce qui a du caractère, c'est-à-dire tout ce qui est fort et vrai. Mais il y a deux manières d'atteindre l'intensité, comme il y a deux manières d'agir en général : on peut fuir ou poursuivre, être le renard ou le lapin. Désirer ou craindre. Etre mû par des passions tristes ou par des affects joyeux. Bref, agir positivement ou négativement, être actif ou réactif.

Pour en revenir à l'artiste, il y a deux manières de créer, d'atteindre des sommets : ou bien de manière réactive, parce que l'on souffre intensément ; ou bien de manière positive, toute naturelle et spontanée, parce qu'il y a en nous un excès de force et d'énergie qui demande à s'exprimer.

Finalement Nietzsche comme Spinoza, dans leur éthique d'adhésion à la vie, valorisent tous deux l'action et disqualifient la réaction. Il faut dire OUI, pas NON. Qu'importe ce que tu fais, du moment que c'est une action.

Etrange critère éthique en vérité.

Cela rappelle Saint Augustin : « Aime et fais ce que tu voudras »...

Mots-clés :  action et réaction   beauté   esthétique   spinozisme   
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La folle au myosotis
Vendredi 27 mars 2009

Il y a deux manières de trouver la beauté : ajouter une couche ou enlever une couche.

Enlever une couche : enlever la couche de pollution qui recouvre un monument ou une maison, éteindre une machine, dynamiter une barre HLM, et surtout dévoiler une vérité, comme le fait par exemple Dogville...

Ajouter une couche : peindre une maison, se maquiller, utiliser un walkman pour ne pas entendre le bruit du métro et de la ville, fumer une cigarette pour ne pas sentir l'odeur de la pollution, ou mettre un encens, etc.

A cette liste on peut ajouter la belle invention de Kundera : la « folle au myosotis » :

Myosotis

Elle se dit : quand l'assaut de la laideur sera devenu tout à fait insupportable, elle achètera chez une fleuriste un brin de myosotis, un seul brin de myosotis, mince tige surmontée d’une fleur miniature, elle sortira avec lui dans la rue en le tenant devant son visage, le regard rivé sur lui afin de ne rien voir d’autre que ce beau point bleu, ultime image qu’elle veut conserver d’un monde qu’elle a cessé d’aimer. Elle ira ainsi par les rues de Paris, les gens sauront bientôt la reconnaître, les enfants courront à ses trousses, se moqueront d’elle, lui lanceront des projectiles, et tout Paris l’appellera : la folle au myosotis...

Milan Kundera, L'Immortalité, 1990
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Les jolies filles
Vendredi 30 janvier 2009

Les jolies filles ont tendance à surestimer la valeur de la beauté, les riches la valeur de l'argent, et les philosophes la valeur de la pensée. Car chacun a intérêt à valoriser le domaine où il excelle. Il y a donc bien du mépris dans la compassion de l'Occidental pour l'Africain, du pianiste pour le philistin, et du paon pour le cheval. Platon et Mill n'ont donc peut-être pas raison quand ils prétendent qu'il vaut mieux être un sage insatisfait plutôt qu'un porc satisfait :

Il vaut mieux être Socrate insatisfait qu’un imbécile satisfait. Et si l’imbécile ou le porc sont d’un avis différent, c’est qu’ils ne connaissent qu’un côté de la question : le leur. L’autre partie, pour faire la comparaison, connaît les deux côtés.
John Stuart Mill, L'Utilitarisme

Je ne suis pas sûr que le sage connaisse véritablement la bêtise, ni surtout le plaisir particulier qui l'accompagne. La bêtise n'est pas affaire de capacité mais d'intérêt et de volonté. Il n'y a pas de gens plus ou moins intelligents, il n'y a que des gens plus ou moins curieux. Pour être « bête », il faut aimer ça ; on le constate chaque jour. En vérité, la bêtise reste une énigme que personne n'a encore comprise.

Mots-clés :  beauté   
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Mon cœur mis à nu
Jeudi 29 janvier 2009
La musique, c'est dingue.
Il suffit d'avoir une belle mélodie dans la tête pour supporter, que dis-je, survoler, les maux du monde, les petites difficultés et mesquineries de la vie.
Alors sans pudeur (car dire ce qu'on aime c'est se mettre à nu), voici la musique qui a inspiré cette petite pensée :


C'est la Sonate no. 4 pour violon et piano de Bach, interprétée par Glenn Gould et Yehudi Menuhin.
Mots-clés :  beauté   hauteur   
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Etre à la hauteur de la beauté
Lundi 19 janvier 2009

De nombreuses personnes refusent de croire à l'utopie communiste, alors même qu'elle se réalise dans certains domaines (communisme électronique notamment). Et il en va de même dans tous les domaines, de la présentation d'un concours aux relations amoureuses en passant par le bateau-stop : la première cause d'échec, c'est l'auto-disqualification.

C'est parce que nous croyons que les choses sont impossibles qu'elles le sont effectivement. C'est le manque d'imagination qui appauvrit le monde. Tout ce qui existe a d'abord été rêvé par quelqu'un.

Finalement ce refus de voir la beauté m'évoque une image : c'est comme un type à qui on dit qu'il y a un superbe cerisier couvert de cerises de l'autre côté de la colline, et qui refuserait de nous croire et d'aller vérifier. Eh bien, au diable, n'en mange donc pas, et reste dans le petit monde que ton imagination produit.

Il faut être digne du monde, il faut être à la hauteur de la beauté ; c'est-à-dire la percevoir. Celui qui en est incapable ne la mérite pas. Notre plaisir dépend de nos capacités de jouissance. Si nous sommes malheureux c'est que notre cœur est trop petit pour la beauté infinie du monde, qui nous dépasse et qui plane, sereine, au-dessus de nos têtes.

Mots-clés :  optimisme   imagination   foi   beauté   éthique   hauteur   
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