Le brin d'herbe

Blog philosophique et politique

Est-ce vraiment compliqué ?
Mardi 29 juin 2010

« C'est plus compliqué que cela. »

« Vous simplifiez à l'extrême. »

« Je ne peux pas vous dévoiler ma pensée en un instant. C'est un long cheminement qui demande nécessairement du temps. »

Voilà des jugements que l'on entend régulièrement dans les bouches intellectuelles.

Mais les choses sont-elles vraiment si compliquées ?

intellectuel

Je remarque deux faits : premièrement, l'intellectuel a un intérêt à ce que les choses soient compliquées. Si les choses étaient simples, il n'aurait aucune utilité. On pourrait se passer de lui.

Deuxièmement, la simplification est au moins aussi intéressante que la complexification. La synthèse est au moins aussi importante que l'analyse. Il faut évidemment aller dans les détails, et distinguer. Mais il est tout aussi essentiel de savoir, in fine, ramener les théories à leurs conclusions, les mettre face à leurs responsabilités en quelque sorte.

Peut-être insistera-t-on davantage sur l'un ou l'autre aspect (analyse ou synthèse) selon que l'on s'intéresse plutôt à la méthode ou au système. La méthode, c'est-à-dire la réflexion pour elle-même, la question pour le plaisir de la question ; le système, c'est-à-dire au contraire le résultat, la réflexion pour les conséquences théoriques et pratiques qu'elle produit (éventuellement).

Quoi qu'il en soit je remarque qu'un grand nombre de choses sont compliquées uniquement parce qu'elles sont terriblement mal expliquées. Je suis même prêt à soutenir qu'aucune théorie philosophique n'est compliquée.

(Mais je ne saurais pas expliquer simplement pourquoi. :)=)

Mots-clés :  simplicité   philosophie   
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La banane et le couteau
Lundi 14 juin 2010

Quand j'étais enfant, et qu'il y avait un fruit ou un gâteau à partager avec mes frères et sœurs, nous avions une règle magique, salomonienne, qui apaisait miraculeusement les conflits magicien :

« Qui coupe ne choisit pas. »

Ainsi, il n'y avait aucune dispute, pas même pour savoir qui couperait. Car avoir le privilège de couper, c'était renoncer à celui de choisir. Mieux, l'intérêt du coupeur était de faire des parts aussi égales que possibles, car il savait bien que l'autre prendrait la plus grosse. Enfin, celui qui coupait ne pouvait contester que l'autre prenne ensuite la part de son choix : il était censé avoir coupé des parts égales, et ne pouvait s'en prendre qu'à lui-même en cas d'inégalité.

Au plus je médite cette simple petite loi, au plus je la trouve merveilleuse.

On retrouve son noble équivalent, en philosophie, dans le « voile d'ignorance » imaginé par John Rawls, philosophe américain ayant élaboré une importante théorie de la justice en 1970, et qui imagine (à titre de fiction censée guider la réflexion, Gedanken experiment) quelles règles de justice nous choisirions si nous ignorions les places que nous occuperons ensuite dans la société...

La banane et le couteau

Plus généralement, on peut tirer de cet exemple de la banane (c'était typiquement des bananes que nous partagions ainsi) l'idée suivante : partout où on peut instaurer des dispositifs de justice, c'est-à-dire des mécanismes, des fonctionnements, des agencements qui poussent les individus à chercher automatiquement la situation la plus juste, il faut le faire, et cela peut remplacer avantageusement les règles générales et abstraites du droit, toujours délicates à appliquer en situation, et dont la complexité est source de mille problèmes (cf. cet éloge de la simplicité sur un autre post).

Si ces dispositifs pouvaient remplacer tout à fait le jargon juridique, peut-être la société ne s'en porterait-elle pas plus mal...

Mots-clés :  justice   économie   dispositif   simplicité   
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Eloge de la simplicité
Vendredi 4 juin 2010

Dans le cadre de la réforme des retraites, il est aujourd'hui question de prendre en compte la pénibilité de chaque métier. L'idée est d'emblée fumeuse à cause de l'indétermination scientifique du concept : comment mesurer la pénibilité ? En l'occurrence il est question d'avoir recours à un examen médical afin de déterminer les droits de chaque personne.

L'intention est louable : les différences d'espérance de vie selon les métiers exercés ont en soi quelque chose de scandaleux, et si c'est l'espérance de vie qui détermine l'âge de la retraite, il serait logique que celui-ci soit proportionnel à celle-là.

D'un autre côté, ces mécanismes visant à rétablir une certaine justice sont nécessairement complexes et lourds à appliquer, surtout dans la société de demain où on n'exercera plus guère un même métier tout au long de sa vie. On voit venir de multiples calculs et systèmes d'ajustements, avec leurs approximations et injustices inhérentes... Il en découlera calculs d'épiciers, tentatives de fraudes, et frustrations multiples... avec finalement un sentiment d'injustice général.

C'est pourquoi on pourrait aussi proposer, comme solution au problème des retraites, la grande simplification suivante : un seul minimum retraite universel, identique pour tous, et, comme son nom l'indique, minimum. Chacun est ensuite libre de se constituer un complément en épargnant tout au long de sa vie.

D'ailleurs, en fusionnant ce minimum avec le RSA, on pourrait créer une sorte de revenu universel pour personnes sans activité, ce qui aurait pour avantage de supprimer la question de l'âge du départ à la retraite : chacun pourrait la prendre dès qu'il le voudrait, si son épargne lui semble suffisante pour satisfaire ses besoins.

On pourrait aussi durcir ce principe en faisant de ce revenu universel quelque chose de facultatif, qui ne serait versé qu'exceptionnellement, aux personnes dans le besoin. On sortirait ainsi de la société d'assistance dans laquelle on s'enfonce un peu plus chaque jour.

Bref, selon la direction dans laquelle on l'étire, ce principe pourra paraître de gauche, ou de droite. L'élément qui ne change pas est la simplicité. On ne saurait sous-estimer la valeur de la simplicité en politique :

Je crois que la France a d'ailleurs particulièrement besoin d'une grande cure de simplicité. Proposition de loi : pour chaque nouvelle loi votée on doit en supprimer une ancienne (si besoin en la fusionnant avec la nouvelle loi). L'idéal étant de ne pas voter de loi et de se contenter de la pratique, du bon sens, et surtout d'instaurer des mécanismes de justice...

Mots-clés :  politique   économie   justice   simplicité   retraites   actualités   
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