Parmi les poncifs de la tradition philosophique qui dégoûtent durablement de la philosophie tant elles semblent, à première vue, évidemment fausses, il y a cette idée de la philosophie du XVIIe siècle (Descartes, etc.) : que les passions viennent du corps
Comme l'indique l'étymologie du mot, les passions seraient des états passifs, où l'âme subit le corps.
Cette idée semble fausse car il nous semble qu'à l'évidence de nombreuses passions, et même toutes, proviennent de notre esprit et de nos idées, sans même parler des passions qui nous semblent être des actions, comme la joie ou le désir intense...
Et pourtant, il y a peut-être une interprétation scabreuse à voir dans le petit fait suivant : une analyse phénoménologique (c'est-à-dire une écoute attentive) de ce qui se passe en nous lors d'une forte émotion révèle que les sentiments nous apparaissent bel et bien comme corporels. Ainsi un soudain chagrin d'amour ne s'abat pas tant sur notre âme elle-même que sur notre corps. Et l'amoureux transi, s'il regarde attentivement, s'apercevra avec étonnement que son chagrin se situe, par exemple, dans le haut du dos, où il pèse comme une douleur, et court le long de sa colonne vertébrale comme une étrange courbature...