Le brin d'herbe

Blog philosophique et politique

A-t-on le droit de manger des bananes ?
Vendredi 28 mai 2010

Je pose la question sans plaisanter :

A-t-on le droit de manger des bananes ? ?

A première vue, non. Cela est moralement interdit, du moins dans les pays Occidentaux. Car comme tout produit lointain, cela consomme du pétrole. Or, les circonstances étant ce qu'elles sont, nous n'avons pas le droit de brûler le moindre litre de pétrole, surtout quand nous pourrions nous en passer (en mangeant des pommes, dans ce cas).

Le problème, c'est que cet argument sera très difficile à faire avaler à ceux qui aiment les bananes et en consomment régulièrement. On veut bien sauver la planète, mais faut pas déconner non plus. vwhiou !

Il sera peut-être plus facile d'admettre qu'il est moralement interdit de partir en vacances aux Bahamas... Mais là encore, allez convaincre celui qui a justement envie d'y aller ce week-end !

Mais au fait, comment savoir ce qui est pire – manger des bananes ou aller aux Bahamas en avion ?

Je pense que cette question est à peu près insoluble. Ou plus exactement : ces deux actes nuisent exactement à proportion de la quantité de pollution émise, donc de la quantité de pétrole consommée. J'y vois un argument de plus pour la taxe carbone. Contrairement aux autres systèmes de régulation comme les quotas, cette simple taxe permet d'agir au plus juste, de faire en sorte que les prix reflètent les coûts réels (y compris le coût environnemental, diffus et difficile à mesurer), afin d'appliquer le principe simple qui résume la solution du problème écologique : pollueur-payeur.

Il y a quelque chose de l'idée de Hayek (grand économiste libéral) dans cet argument : on ne peut déterminer dogmatiquement le bien et le mal. Il faut laisser les hommes libres (de manger des bananes ou d'aller aux Bahamas. Mais qu'ils paient pour la pollution engendrée par leur action. Ainsi tout le monde sera content.

D'un autre côté, il y a aussi dans ce « libéralisme écologique » un principe peu libéral : l'idée que les marchés ne prennent pas en compte d'eux-mêmes les coûts globaux et diffus, notamment écologiques. Il y a d'ailleurs là une analogie avec le risque systémique en finance, et un développement philosophique à établir dans le rapport entre le tout et la partie. Le libéralisme trouve ses limites dans les conditions qui s'appliquent au tout, au marché dans son ensemble. Celles-ci doivent être définies extérieurement, par l'Etat. Les parties du jeu sont définies par un tout qui ne fait pas partie du jeu. La théorie libérale admet d'ailleurs parfaitement et évidemment ce principe : le libéralisme est fondé sur l'Etat et la loi. La liberté est fondée sur la force.

Mots-clés :  économie   écologie   libéralisme   taxe carbone   justice   
Afficher les commentaires (3 commentaires)
Ecrire un commentaire

Retour en haut de page

Contact       Fil RSS

Le Brin d'Herbe - Blog philosophique et politique